Rifugio Nacamuli, Col Collon
Pour cette deuxième sortie en territoire italien, nous nous rendons cette fois-ci à l’est de l’axe routier Martigny-Aoste. Une longue vallée lèche les flancs sud de plusieurs « 4000 » valaisans, du Grand Combin à la Dent d’Hérens : c’est la Valpelline. Ici aussi il règne un calme rare. Loin de Courmayeur (Mont Blanc) et des vallées de Valtournenche, Ayas et Gressoney (Cervin, Mont Rose), la région d’Aoste recèle décidément beaucoup de trésors préservés du tourisme de masse.
Depuis la Valpelline, les possibilités de tutoyer les hauts sommets des Alpes Pennines sont nombreuses. L’orientation sud de ces itinéraires permet d’accéder à des cols élevés dont l’approche par la Suisse est longue ou compliquée : col de Crête Sèche, col de By, Fenêtre de Durand, col Collon… C’est ce dernier qui fait l’objet de cette excursion. Sa situation à la frontière italo-suisse du bassin glaciaire du Mont Collon est à couper le souffle… un souffle déjà bien entamé par l’altitude : 3069 mètres. En découvrant son univers de glace et de roc, on a peine à croire qu’à d’autres époques du bétail y transitait [1].
Si le col vous semble trop haut ou trop lointain, le Rifugio Nacamuli, sur ce même itinéraire, est également un très bel objectif pour une randonnée d'un jour. De l’avis général, la cabane n’est pas très fréquentée. Ainsi sur internet on peut lire le commentaire suivant :
Nous étions... 5 personnes en tout à dormir au refuge (en plus des deux gardiennes) ! Il paraît que c'est devenu normal en dehors d'août.
Il faut se rendre au lac de Place Moulin (Places de Moulin), tout au bout de la Valpelline. Pas facile sans être motorisé, à moins d’organiser un taxi au village de Bionaz. De la grande place à côté du barrage, les panneaux des sentiers pédestres donnent le refuge Nacamuli à 3h30. On se met en marche dans la direction indiquée, sur la route longeant le lac vers Prarayer. Après seulement 5 minutes, on la laisse pour prendre un sentier qui s’en détache à gauche. Par une douce montée au milieu des mélèzes, on rejoint la route supérieure plane [2131m, 20min]. Celle-ci aboutit bientôt à un grand terrain vide, Arp Passaou (Arpeyssaou). Un sentier poursuit au-delà de cette place. Il traverse une forêt clairsemée qui laisse entrevoir le beau lac couleur turquoise en contrebas.
A la bifurcation entre Nacamuli/Collon et Prarayer [2116, 50min], choisir la voie de gauche. Une flèche jaune peinte sur un rocher indique Collon. Tout en longeant un bisse charriant de l’eau troublée par le bétail de l’alpe Oren, on oblique graduellement vers le nord-est. Au fond de la Comba d‘Oren, des glaciers très haut perchés. La marche reste facile jusqu’au pont de La Garda [2211m, 1h15], et même un peu au-delà, maintenant en rive gauche du torrent.
En face de nous se dresse un monticule morainique qu’on remonte par des lacets à droite, en se faufilant entre le flanc de la Becca Vannetta et le torrent. On débouche sur le plateau sablonneux d’origine glaciaire de Plan du Gan [env. 2450m, 2h15]. Puis le sentier oblique brusquement vers la droite contre la falaise humide et gazonnée. Des cordes et des marches métalliques scellées dans la roche sont là pour assurer un passage sans encombre. En peu de temps on passe ainsi de 2450m à 2700m. Lorsque la pente se radoucit (cairn), on a franchi un palier de la combe d’Oren. On découvre pour la première fois le Rifugio Nacamuli perché sur son promontoire. La spectaculaire rampe d’accès aux toilettes ne passe pas inaperçue !
On passe un pont en bois sur le torrent glaciaire [env. 2725m, 2h45] et on reprend l'ascension des 150 mètres restants. Le sentier décrit un large demi-cercle de droite à gauche qui nous porte à la hauteur de l’ancien refuge, le Bivacco Col Collon. Entre cette petite bicoque toute mignonne collée à la falaise et le refuge moderne de Nacamuli, il n’y a plus que quelques dizaines de mètres dans des roches rouges et lisses. On mange paraît-il plutôt bien à Nacamuli [2830m, 3h15], comme dans la plupart des cabanes italiennes.
Pour poursuivre vers le col, prendre le chemin qui part horizontalement à droite de la cabane. Il descend légèrement dans un pierrier, puis entame une longue remontée... dans un pierrier. Ce n'est plus que pierraille jusqu’au col. Quelques maigres glaciers vivotent par-ci par-là. Celui à main droite (glacier de la Pointe du Laurier Noir) donne naissance à une belle cascade qui glisse sur des roches polies.
Le sentier est meilleur que prévu (cairns, marques jaunes). C’est sans difficultés notoires qu’on atteint le col Collon [3069m, 4h15], un plateau empreint d’une splendide désolation. Seul un petit lac glaciaire égaie un tantinet le décor. Les flèches de roc de l’Evêque et de la Mitre sont déjà en territoire helvétique. En l’absence de névés, le terrain tout en monticules de pierres permet de trouver différents points de vue sur les glaciers. Les Suisses Romands qui ont le mal du pays peuvent s'offrir une brève incursion dans leur patrie en passant la frontière au nord du lac, sous la Vierge. Mais prudence : on est ici en très haute montagne.
La descente utilise le même itinéraire que la montée (compter environ 3 heures). Si on est peu pressé de rentrer, un crochet vers le chaleureux refuge de Prarayer (Praz Raye) est recommandé. A la bifurcation du point 2116, prendre à gauche et se diriger vers l’embouchure du torrent Buthier dans le lac. On y est en quelques minutes. On pourra y faire bombance sans arrière-pensée car une large piste ramène ensuite en 1 heure au parking du barrage.
Cette randonnée figure dans le livre
Randonnées pour Grizzlys
Alpes valaisannes
paru en 2013 aux éditions Slatkine.
Le livre peut être commandé en ligne sur le site de Slatkine ou acheté dans toute bonne librairie de Suisse Romande.