Randonnées pour grizzlys

et autres animaux solitaires

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Baltschiedertal, bisse de Niwärch, Baltschiederklause

Cette randonnée figure dans le livre

Randonnées pour Grizzlys

Alpes valaisannes

paru en 2013 aux éditions Slatkine. Livre 'Randonnées pour Grizzlys - Alpes valaisannes'

Le livre peut être commandé en ligne sur le site de Slatkine ou acheté dans toute bonne librairie de Suisse Romande.

Si un jury devait élire l’endroit de Suisse le plus éloigné de toute civilisation, la cabane de la Baltschiederklause pourrait bien remporter la palme. Un accès qui s’enfonce au cœur des Alpes Bernoises durant 5 à 6 heures, sans aucune bifurcation ou presque, sans habitation ni ferme d’alpage, ... Dans certains autres massifs du globe, ce serait banal, mais dans les Alpes Suisses, c’est plutôt rare. Vu l’ampleur de la tâche pour rallier la cabane, on ne la fixera pas forcément comme but de la journée. L’idée est de se faire plaisir dans un environnement de haute montagne préservé et varié. La simplicité du routage invite à la marche méditative. On peut oublier les carrefours de sentiers et la crainte de se tromper. Et cerise sur le gâteau : on entre et on ressort du Baltschiedertal par les plus beaux bisses de Suisse.

Les attentes étaient donc grandes au moment d’entreprendre cette randonnée. Or si j’ai décerné une note de grizzlitude de 2 sur 5 seulement, c’est qu’elles ne furent qu’à moitié comblées. Selon ma propre expérience et celle d’autres randonneurs, on ne trouve pas toujours la solitude espérée le long de ce parcours. Les bisses menant dans le Baltschiedertal, à la fois intéressants et – dans le cas de la Gorperi et de l’Undra – assez faciles, attirent peut-être plus de visiteurs que dans le Gredetschtal ou le Seetal, plus confidentiels.

Visiter la cabane en une journée est donc possible mais pas très raisonnable. Même en partant du point le plus proche, Choruderri, cela demandera tout de même 5h30 de dur labeur… sans compter le retour. Le point de départ est évident : un virage situé à 1259m d'une route soumise à autorisation. Le laisser-passer s’obtient auprès d’un des hôtel-restaurants d'Ausserberg. A Choruderri, on trouvera un tableau d’information sur le district franc fédéral d'Alpjuhorn ainsi qu’un avertissement sur les dangers du bisse de Niwärch. Les panneaux indicateurs des sentiers pédestres donnent la Baltschiederklause à 5h05. C’est moins que ce qui était prévu mais on va bientôt déchanter...

###icone danger

On rentre aussitôt dans le vif du sujet : le bisse de Niwärch. On connaît sa réputation de bisse vertigineux. C’est donc sans surprise qu’après quelques minutes et un petit monument religieux, les passages impressionnants se succèdent : bazots suspendus avec planches pour les piétons, encorbellements excavés de la falaise,… Le bisse est absolument magnifique et la hardiesse de sa construction laisse rêveur... pas trop quand même car il s’agit d’être attentif. Oui, les passages aériens sont munis de cordes ou de câbles, mais pas tous ! De toute manière, ce ne sont pas les passerelles, aussi vertigineuses soient-elles, qui sont les plus scabreuses, mais bien plus les murets souvent en surplomb sur lesquels évolue le chemin du bisse. Si le Niwärch vous met dans vos petits souliers (de marche), il vaut mieux faire demi-tour, remonter quelques minutes sur la route et prendre le passage souterrain. Suivre Stolleneingang et sortir sa lampe torche ou sa frontale car la galerie n’est pas éclairée.

Le bisse est partiellement en eau. Les flots passent même dans certaines sections de bazots. Le terrain s'aplanit peu à peu. On arrive à un chalet et une étable, Ze Steinu [1296m, 45min]. C’est là qu’on déchante : le panneau indique que la Baltschiederklause est à 5h, soit 5 minutes de moins qu’il y a ¾ d'heure. Les mathématiques haut-valaisannes sont impénétrables… tout comme le langage. Le sentier s'élève ensuite de quelque 50 mètres, puis reprend son cheminement assez tranquille. On atteint Eiiltini [1476m, 1h20] : plusieurs croix et une chapelle que jouxte un groupe de maisons, la plupart en bois. On dirait un camp de trappeurs canadiens. Une belle passerelle sur le torrent rugissant nous fait passer rive gauche. Le paysage devient de plus en plus sauvage au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans la vallée. Avec les orties en bordure du sentier, on apprécie le pantalon long.

Le sentier reste proche du lit du torrent afin d'éviter les cônes d’avalanche. On débouche sur un joli plateau au milieu duquel trône un gros bloc rectangulaire. C'est Chiemattu. Un petit cabanon tente de passer inaperçu, blotti qu'il est sous un rocher. La montagne pointue au fond, visible déjà à la sortie du bisse, est le Stockhorn. On s’apprête à remonter le versant gazonné à droite et passer derrière ce sommet culminant à 3200m. Cette rude ascension dans les pentes herbeuses nous porte de 1600m à 1950m et se termine au pont de Martischipfa [1940m, 3h]. De l'autre côté débute une seconde montée, dans les vernes cette fois-ci. Lorsqu’on atteint la chapelle d'Hohbitzu [2200m, 3h45], on trouve enfin un peu répit.

Le décor est devenu glaciaire. Le torrent, si calme à Chiemattu, dévale de façon spectaculaire une gorge sculptée par d’anciens glaciers. En face, on distingue des traces nettes d'un sentier qui conduisait jadis à une exploitation minière.

On parvient sur la plaine du Baltschieder. Au sol, un entrelacs de rus glaciaires. Tout autour, des sommets entre 3000 et 4000 mètres - Stockhorn, Bietschhorn, Jägihorn. Des ponts en bois, dont un apparemment temporaire, aident à repasser sur la rive gauche du Baltschiederbach [env. 2275m, 4h]. Leur nombre et leur disposition varie en fonction du niveau des eaux. Sur une terrasse au sud du Jägihorn, la cabane nous nargue, à la fois si proche et si lointaine. 500m de dénivellation supplémentaire, cela équivaut à 1h½ de marche. En ce qui nous concerne, nous interrompons la randonnée au pied de la moraine finale. Les nuages sont menaçants et un orage dans cet endroit reculé serait ennuyeux.

Le chemin de descente est identique à celui de la montée. Si la fatigue se fait sentir, il est préférable de rentrer par le tunnel plutôt que de risquer une inattention sur le Niwärch.

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