Randonnées pour grizzlys

et autres animaux solitaires

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Gredetschtal, Lüterbrunno, bisse de la Wyssa, bisse du Stigwasser

Cette randonnée figure dans le livre

Randonnées pour Grizzlys

Alpes valaisannes

paru en 2013 aux éditions Slatkine. Livre 'Randonnées pour Grizzlys - Alpes valaisannes'

Le livre peut être commandé en ligne sur le site de Slatkine ou acheté dans toute bonne librairie de Suisse Romande.

Les vallées retirées et sauvages existent encore. C’est ce que ce livre essaie de démontrer. Elles sont particulièrement nombreuses dans cette partie du Haut Valais s’étirant du Lötschental à Belalp qu’on pourrait désigner par « sud du Bietschhorn ». Aucun domaine skiable n’y est venu défigurer les coteaux ensoleillés, aucun village n’a colonisé les fonds de vallée. Pas de barrages pharaoniques non plus. A l’inverse, des bisses aussi spectaculaires que séculaires, la plupart en activité et fièrement choyés par les locaux. La région reste méconnue des Romands. Elle est pourtant peu éloignée et on la rejoint confortablement en transports publics.

Le sud du Bietschhorn mérite qu’on s’y attarde dans le cadre de trois randonnées différentes. Car chaque vallée affiche son propre caractère : la douceur verdoyante du Gredetschtal, la démesure glaciaire du Baltschiedertal, la discrétion du Seetal.

Pour faire connaissance avec cette région, tournons-nous vers le vallon idyllique du Gredetschtal. L’altitude peu élevée et la faible déclivité de cette vallée en auge la destinent aux mois de juin-juillet, quand d’autres sentiers sont encore impraticables. En fin d’automne, les rayons du soleil peinent à réchauffer le fond de vallée. Il faut y aller sans but précis, jusqu’à ce que le sentier se perde ou que les cônes de neige des couloirs avalancheux nous stoppent. Hormis le silence, il n’y a rien tout au fond du Gredetschtal : aucune cabane, aucun col ou sommet pour randonneur, aucun alpage au-delà de Strick, et un sentier qui se fait discret tout en restant discernable.

Du centre de Mund, le village du safran, nous prenons la direction de Roosse. Si besoin est, on trouvera un petit parking à l'entrée de Tähischinu, deux virages plus haut. Chercher à parquer plus en amont ne sert à rien car le bisse du Stigwasser nous ramènera directement à Tähischinu.

Le sentier coupe la route à plusieurs reprises. On rencontre occasionnellement des marques jaunes, mais pas systématiquement. Le balisage est un tantinet déficient, comme si on ne voulait pas qu'on débusque ce bisse formidable. A partir de Roosse [1406m, 20min], on suit l’indication Strick (Stollen Gredetsch Suon), ce qui nous fait passer entre des granges. Comme on le voit il n’est nulle part question du bisse de la Wyssa. Quant au mot « Stollen », il désigne le tunnel. Bisse et tunnel sont accessibles au même endroit. Si comme moi on rate la dernière portion du sentier, au panneau Salwald revenir à droite par la route marquée Wässerwasser.

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On finit par arriver à Zienzhischinu [1473m, 45min]. Ce nom à consonance chinoise marque soit le début du bisse, soit l’entrée dans la galerie. Les personnes sujettes au vertige utiliseront le tunnel (large et éclairé) car le bisse de la Wyssa est aérien et ne tolère aucun faux pas. On peut s’en convaincre après seulement quelques minutes. Le chemin du bisse bute contre la falaise et entame une série de courts tunnels et de passages en encorbellement creusés dans la roche Un panneau souvent photographié met en garde les promeneurs.

De courts tunnels sont monnaie courante sur les parcours de bisse. Or ici ils ont une particularité : on les partage avec l'eau. La plupart du temps on marchera sur des planches non pas à côté mais sur les flots ! Le terrain est véritablement très abrupt et les tunnels se succèdent. On n’y risque pas la chute mais on pourrait s’y cogner la tête. Comme dans Indiana Jones et la Dernière Croisade, il faut faire preuve d'humilité pour passer ces obstacles. On ne les traversera qu’en se prosternant, a fortiori avec un sac à dos. Mais le Graal - le Gredetschtal - est à portée de godillots. Une section extérieure assez impressionnante est munie d'un câble. On jette les premiers coups d'œil vers le fond du vallon sauvage. Si on ne souffre pas du vertige, alors cette alternance de tunnels et de surplombs constitue une expérience ludique. Un chenal très spectaculaire traverse le vide sur plusieurs mètres. On y a aussi reconstitué le marteau et la roue à eau qui permettaient au gardien du bisse d’être averti en cas de débit anormal [3].

Deux des galeries sont trop longues pour que la lumière du jour y pénètre entièrement. On se retrouve aveugle et courbé en deux à crapahuter sur des planches posées sur l'eau, en espérant qu’il n’en manque pas une. Un des tout derniers tunnels a le plafond si bas qu'il contraint à avancer à 4 pattes! Le tronçon des falaises derrière soi [1h45], on pénètre dans un environnement plus bucolique: des prés, des vaches, une flore abondante sur les rives du bisse. On continue à longer le filet d'eau puis on rejoint la route de montagne provenant du grand tunnel (oratoire). On notera la prise d’eau sur le Mundbach, légèrement en contrebas.

Les aficionados des bisses savent que la Wyssa est un de leurs représentants les plus remarquables. On peut donc y croiser passablement de randonneurs (croisements qui sont scabreux). Dès maintenant la sensation de solitude va aller crescendo, car beaucoup de randonneurs ne rentrent pas dans le vallon. Ils préfèrent enchaîner avec un autre bisse, l’Obersta, et s’en retournent en délaissant la petite merveille de vallée qui s’ouvre à cet endroit.

En suivant la piste d’alpage on passe devant Chiestelli, puis la ferme de Strick, avec ses enclos à moutons qu'on appelle ici Färricha [1655m, 2h20]. A partir de là, la piste se mue en un sentier raboteux. On continue à remonter la vallée glaciaire (forme en U) jusqu'à ce qu'on en ait marre ou jusqu'à être bloqué par la neige : Strick, Lüterbrunno, voire au-delà. Les cartes les plus récentes montrent un sentier aux traits de plus en plus discontinus qui s'interrompt définitivement à la cote 2006.

Après un cabanon de berger camouflé dans la pente, non indiqué sur la carte, le chemin devient sente. Mais le terrain reste toujours aussi facile. Lüterbrunno [1819m, 3h] est un bien bel endroit pour une pause : quelques gros blocs en bordure du Mundbach, sinon rien.

L’itinéraire de descente est identique jusqu’à l’embranchement entre la route et le sentier de la Wyssa [3h45]. Ensuite on peut faire son choix parmi trois alternatives :

• Refaire le bisse de la Wyssa • Rentrer par le tunnel : dans ce cas il suffit de demeurer sur la route pour y accéder • Revenir par le bisse de la Stigwasser, qui coule entre 100 et 200 mètres en aval de la Wyssa. De la route se détache un sentier dans la pente sur sa gauche. Il se rapproche du Mundbach. On rejoint facilement Üssers Sentum (maison, oratoire et pont) [1344m, 4h]. Peu après, une bifurcation munie d’un panneau indicateur nous conduit sur le sentier du bisse. C’est le chemin du haut : Tähischinu, Mund (Stiegwasser). Comparée à la Wyssa, la Stigwasser a bien de la chance. Elle n’a pas à faire autant d’efforts pour sortir du Gredetschtal. Son tracé est plat, en forêt. Hélas, plus on se rapproche du village, plus l’entretien du sentier laisse à désirer. A la sortie du bois, alors qu'on approche de la fin, on doit encore se frayer un passage dans les hautes herbes des prés de Tähischinu. Le parcours bucolique de la Stigwasser se fait alors désagréable. On y passe un mauvais quart d’heure, ne voyant ni où l’on met les pieds ni où coule l'eau du bisse.

Au niveau du temps de marche, les trois variantes sont plus ou moins équivalentes. Compter 4h30 effectives pour le circuit Mund-Lüterbrunno-Mund.

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