Tour du Sérac, vallon de la Nétage, arête de l'Arpille, Grand' Gouilles

A l’écart de la route du col du Sanetsch, le vallon de la Nétage s’étire en une ligne nord-sud parfaite, comme si des forces magnétiques et non des processus géomorphiques s’étaient chargé de sa formation. Le sentier qui le parcourt permet de réaliser une jolie boucle autour des montagnes du Sérac et du Sublage.

L'idée de ce tour m'a été donnée par le site Internet toprando.ch, aujourd'hui fermé, semble-t-il. Ce que son auteur appelait Tour du Sérac consiste en une longue boucle partant de l'alpage d'Infloria et remontant le sauvage vallon de la Nétage pour déboucher sur la plaine désolée des Grand' Gouilles. On finit par l'arête noire et austère de l'Arpille, particulièrement belle à la lumière du soir. Un parcours long mais varié: verts alpages, schistes anthracite, lapiés gris-clair, neiges du Wildhorn... et tunnels noirs!

Oui, car il y a un hic: la liaison entre le col du Sanetsch (ou Col de Sénin) et l’amorce du sentier à Infloria. Pas d'autre solution que la route du col et son tunnel des Fonjales. Pour cette raison, je recommande de ne pas réaliser le circuit complet tel qu’il est décrit ici un week-end d'été. Une meilleure idée est de synchroniser sa randonnée avec les horaires du bus postal, soit en recourant intégralement aux transports publics, soit en parquant près de Dorbagnon. Sachant que le bus ne descend qu’une fois par jour, il ne faut pas se planter ! Au moment de publier ces lignes, l’horaire est de 17h34 au départ du col. Si on dispose de deux véhicules, on peut en laisser un au col et l'autre à Dorbagnon/Infloria, bien que les places y soient rares.

Depuis le col, un large chemin redescend à l'Hôtel du Sanetsch [2047m, 30min]. Jusque-là ça va. L'arête de l'Arpille, avec son noir intense comme de la lave, ses taches d'herbes et des plaques de neige, nous transporte presque en Islande. Depuis ce point il faut malheureusement suivre la route et pénétrer dans ce tunnel long de 800m creusé dans la face sud du Sublage. La galerie est large et éclairée, et si vous êtes chanceux peu de voitures passeront. Les 10 minutes que nécessite la traversée restent toutefois désagréables, car ça n’est visiblement pas un endroit pour piétons.

Après Dorbagnon et ses quelques maisons adossées à la pente à droite de la route, on retrouve un tunnel, celui-ci très court. A la deuxième route d’alpage, le panneau indicateur d’Infloria marque le début de la randonnée proprement dite [1920m, 1h10]. Suivre Grand'Gouilles par le vallon de la Nétage, estimé à 1h30, une estimation bien trop optimiste. Une indication de 2h30 serait plus proche de la réalité, et encore, sans compter les pauses. A gauche, le sommet qui sera l'axe de notre circumambulation: le Sérac. Tout biscornu, il ne cessera de changer d'apparence au cours de notre périple.

La route d'alpage, presque plane, nous a conduits à la ferme de La Crêta. Elle continue, plus bosselée, car il y a une autre ferme un peu plus haut, Chaux de la Lé [2044m, 2h]. Un crucifix et une flèche peinte sur un rocher nous font poursuivre à droite. Le sentier en dévers s'enfonce dans le vallon préservé de la Nétage. Le Sérac réapparait à notre gauche. Sous cet angle, le mimétisme avec le Mont Kailash, la montagne sacrée des bouddhistes et des hindous, est amusant. D'autant plus que nous en faisons le tour, tout comme les pélerins tibétains font le tour du Kailash.

Le balisage est bien là, mais assez discret. Quant au sentier, il est acceptable, et surtout sans danger. A l’instar d’autres itinéraires de ce guide, les cartes récentes répertorient bel et bien un sentier ici, mais avec quelques bouts manquants. Les parois du vallon semblent vouloir se refermer sur nous. L'impression est fausse. Une fois sur le plateau karstique de Tsa di Faye, le versant est s'ouvre sur un paysage de lapiés coiffés par le Sérac. Comme souvent, suivre un itinéraire dans des lapiés demande une attention accrue. Même dans l'herbe, la sente est désormais un peu moins marquée, signe de la faible fréquentation de ce coin de montagne. Bientôt, aux Grand' Gouilles, on rejoindra un itinéraire plus important, celui de la cabane des Audannes. Le balisage sera à nouveau parfait et le sentier plus facile à suivre. En attendant on se repère grâce aux cairns et aux marques de peintures occasionnelles.

Le décor est toujours aussi beau: la muraille barrant le vallon à l'est se poursuit jusqu'au Col des Audannes et le Mont Pucel. Si on était un gypaète, on logerait bien volontiers dans ces falaises. Il y en aurait dans le coin, paraît-il. Peut-être aurez-vous la chance d’apercevoir son auguste silhouette. On persiste tout droit dans les lapiés. Peu avant le replat, prendre garde à ne pas manquer la courte descente en dessous d'une barre rocheuse [env. 2450m, 3h30]. Cette section-là devrait se faire de préférence par bonne visibilité.

A noter que le Col des Audannes n'est pas au niveau de la dépression, mais sur les pentes au sud du Mont Pucel. On peut apercevoir son sentier zèbrant les éboulis. Au terme de la remontée du vallon, un petit cabanon tout pourri nous accueille [2484m, 4h]. La plaine qui débute ici est un univers désertique dans lequel l'eau est plus ou moins présente, selon les saisons. On longe de très près le ruisseau de la Nétage avant de tourner vers l'ouest. C'est Grand'Gouilles. La première mare du point 2471 est bien remplie par les précipitations des jours précédents. Il reste environ 200 mètres de montée avant de rejoindre l'arête de l'Arpille.

En continuant plein est dans cet environnement stérile on arrive au panneau indicateur planté sur l'arête de l'Arpille [2652m, 5h30]. Cette fois-ci le Sérac a pris la forme d'un tremplin de ski. C'est par ce côté-ci qu'on l'escalade habituellement. Le Sublage déroule sa longue arête. Belle vue aussi sur l'Arpelistock, sommet pour randonneurs mais randonneurs avertis car balisé bleu-blanc. A l'est, le glacier des Diablerets, les lapiés de Tsanfleuron... En contrebas, le Col du Sanetsch et son lac de barrage nous font miroiter la fin de nos efforts. En effet il ne reste plus qu’à suivre le fil de l'arête de l'Arpille jusqu'au col du Sanetsch. Il y a un peu de vide de part et d'autre, mais lorsque le terrain est sec cela reste du niveau T3. Compter 6h30 pour l’intégralité du parcours.